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Vers la République indivisible, juive, démocratique et sociale ? Par Kader Hamiche

16 octobre 20150
Vers la République indivisible, juive, démocratique et sociale ? Par Kader Hamiche 5.00/5 3 votes

Publié le : 15 octobre 2015

Source : kader-hamiche.fr

France culture, la radio des êtres humains…

Samedi 10 à 9 heures, comme tous les samedis, je m’apprête à écouter sur le site internet de France Culture l’émission d’Alain Finkielkraut « Répliques ». Pour savoir de quoi il est question ce jour-là, je clique sur l’onglet « détails » et lis ce qui suit : « Le sens de la République – Invité(s) : Georges Bensoussan, historien et responsable éditorial au Mémorial de la Shoah ; Patrick Weil, historien, spécialiste français des questions d’immigration et de citoyenneté, directeur recherches au CNRS, professeur invité à l’université de Yale. »

Aussitôt me vient cette réflexion que, donc, pour parler de la République française à la radio de service public France culture, on réunit trois Juifs dont au moins deux sionistes. J’ai ressenti comme une nausée. Tant pis si on m’interdit de radio et de télé (1) ; de toute façon, ma barque est déjà assez chargée pour que personne ne pense à m’y inviter. Et depuis longtemps. Trop, c’est trop ! J’ai donc décidé de ne pas écouter en me promettant d’y revenir car je suis certain que M. Bensoussan a été excellent et l’émission passionnante. En effet, si on peut reprocher à Alain Finkielkraut sa névrose obsessionnelle et son judéocentrisme, on ne peut jamais dire que son émission soit inintéressante. D’ailleurs, il adore inviter des gens qui ne pensent pas comme lui. Je me souviendrai toujours, à cet égard, d’une émission où Shlomo Sand et Maurice Kriegel furent confrontés sur le thème « Faut-il déconstruire Israël ? » Ce fut épique et jouissif ! Mais cet acharnement à occuper l’espace médiatique a quelque chose d’indécent. Surtout quand On aimerait se reposer un peu.

Je ne connais pas bien M. Bensoussan et ce que j’en sais me fait penser qu’il est à cent lieues des deux autres débatteurs, juifs comme lui. Mais quelque chose me dit que les sionistes compulsifs comme Finkielkraut ou sournois comme Patrick Weil ne donnent pas la même définition que lui du judaïsme. C’est une spécialité de Finkielkraut : ça fait peut-être partie du cahier des charges de son émission mais il invite souvent deux personnes qui ne pensent pas la même chose sur des sujets qui le travaillent, lui… pourvu qu’elles soient toutes les deux juives. Or, ce qui le passionne le plus, c’est Israël, les Juifs, la shoah, auxquels il consacre au moins une émission sur deux. Il y a quinze jours, c’était « Y a-t-il une religion de la Shoah ? » avec, comme invités, la philosophe amie des bêtes Elizabeth de Fontenay et l’historien Alain Besançon. M. Finkielkraut était dans son élément puisque la première est juive et que le second est marié à une juive. J’ai écouté l’émission et Alain Besançon m’a régalé. Mais E. de Fontenay, que j’aime bien quand elle parle de souffrance des animaux, s’est montrée odieuse et d’un fanatisme indigne d’un philosophe. Au point que, pour la première fois depuis que je suis cette émission, je ne suis pas allé à son terme.

Mais, si je vous raconte tout ça, et si je vous fais part de mon indignation, c’est qu’il y a derrière cette affaire des enjeux importants pour notre pays. France Culture, comme beaucoup d’institutions et de services publics français, fait comme si le modèle communautaire vers lequel « on » veut entraîner notre pays était déjà en exercice. M. Finkielkraut peut être agaçant mais il est amoureux de la France. Il est aussi inquiet de son avenir que de celui de son cher Israël. Ce n’est pas le cas de tous les sionistes qui passent à son micro ou qui lui tendent le leur.

On remarquera que le CV des invités indiqué sur le site de l’émission est rien moins qu’exhaustif. Patrick Weil n’est pas seulement un historien et un universitaire. C’est aussi – et surtout – un lobbyiste politique et communautaire, qui agit depuis trente ans pour la communautarisation de la France sur le modèle américain. Il a, notamment, inspiré la loi Guigou de 1998 (2) qui, revenant sur la loi Pasqua de 1993, instaurait l’acquisition automatique à 18 ans de la nationalité française par les enfants d’immigrés nés en France. En réalité, la plupart des lois facilitant l’immigration et l’acquisition de la nationalité française votées dans les années 90 l’ont été sous la pression du lobby sioniste français pour permettre de recevoir un maximum de Juifs candidats à l’exode à la suite du démantèlement du bloc de l’Est (3). C’est, par exemple, à cette époque que le délai de naturalisation des étrangers est passé de dix à cinq ans (4).

Des lois, soit dit en passant, à géométrie variable car une interprétation laxiste fait qu’elles sont quelquefois appliquées à la tête du client. Témoin l’affaire Gilad Shalit. Trois années durant, entre 2008 et 2011, la France d’en haut s’est toute entière mobilisée pour que le gouvernement français fasse pression sur les Palestiniens pour qu’ils libèrent le jeune Gilad, soldat israélien qu’ils avaient pris capturé en juin 2006. Ce, sous prétexte qu’il était français, ce qui est faux. Pour que la loi s’applique, il fallait qu’il soit né en France, qu’il y ait vécu au moins 5 ans entre 11 et 18 ans et qu’il y réside à la date de sa majorité. Aucune de ces conditions n’a été respectée, le jeune Shalit n’ayant même jamais vécu en France. De fait, sa relation avec la France ne tient qu’à sa grand-mère maternelle ; ni lui ni ses parents ne parlaient français. Autrement dit, avant cet épisode, il n’avait aucune espèce de rapport avec la France (il l’a, semble-t-il appris depuis). Ce qui n’a pas ému le gouvernement de l’époque et tout ce que l’univers et ses environs comptent d’amis des Juifs.

La liste des actions menées pour sa libération et des déclarations qui les ont émaillées est impressionnante (lire) mais je n’en citerai que celles concernant des Français : la citoyenneté d’honneur donnée à Gilad Shalit par le maire tunisien (5) de la Ville de Paris Bertrand Delanoë en décembre 2008 ; la manifestation de soutien du 21 juin 2010 à Paris ; le 27 juillet 2010, sur Europe 1, après l’assassinat de Michel Germaneau, François Fillon, alors Premier ministre, parle de « quatre Français encore détenus » dont le « Franco »-Israélien Gilad Shalit ; le 29 août 2010, le président de la République française, Nicolas Sarkozy, apporte son soutien à une manifestation organisée à Jérusalem en faveur de Gilad Shalit en faisant lire une déclaration par un membre de l’ambassade de France ; le 20 janvier 2011, Michèle Alliot-Marie, ministre français des affaires étrangères, rend visite au père de Gilad Shalit en Israël ; le 17 juin 2011, Angela Merkel et Nicolas Sarkozy demandent dans une déclaration commune la libération de Gilad Shalit ; enfin en octobre 2011, une pluie de témoignages de satisfaction accueille la libération du prisonnier, dont celles de Sarkozy qui parle de « « bonheur » et d’« émotion ».

En échange de sa libération, Israël a relâché 1 097 Palestiniens. Parmi eux, il y avait un certain Salah Hamouri, un jeune Palestinien âgé d’un an de plus que le jeune Shalit et israélien comme lui (Note de La Plume : Salah Hamouri est bien en réalité FRANCO-Palestinien). Salah Hamouri était détenu depuis mars 2005 pour cause d’ « intention de participer à un complot visant à l’assassinat » d’un rabbin ultra-orthodoxe (lire). Pour lui, aucune mobilisation, aucune manifestation, aucun message de quelque politique que ce soit, pas de citoyenneté d’honneur (il n’en demandait pas tant), pas de réception par le Pape – alors qu’il a été éduqué à l’école privée catholique De La Salle Collège des Frères des Écoles chrétiennes, à Jérusalem, puis à l’Université (catholique) de Bethléem.

Il est vrai qu’Israël, qui a tué plus de 200 personnes et fait 800 blessés en une seule journée (le 28 juin 2006) dans la bande de Gaza, est un « état de droit » (6) (Cédric Goubet, chef de cabinet du Président de la République Sarkozy (7) en 2009). Mais il est surtout vrai que Salah Hamouri n’est pas franco-quelque chose. Détenteur d’un passeport israélien, il n’est pas français puisqu’il n’est pas né en France, même si sa mère, Denise Guidoux est française. Moralité : on n’a pas fait pour l’enfant d’une authentique catholique française le centième de ce qu’on a fait pour le fils d’un juif étranger.

Faudra-t-il réécrire l’article premier de la Constitution française en ces termes : « La France est une République indivisible, juive, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion, mais les citoyens juifs sont plus égaux que les autres. Elle respecte toutes les croyances, surtout le judaïsme. Son organisation est décentralisée : elle peut, notamment, se gouverner à partir de Tel Aviv ou de Jérusalem » ?

Kader Hamiche

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1) Comme c’est le cas de Renaud Camus, qui, quinze ans après, paie encore son courage de s’être indigné en direct de ce que Laure Adler avait composé un plateau en majorité de Juifs pour parler d’un sujet d’ordre général (je ne me souviens plus lequel bien qu’ayant écouté l’émission) à Panorama. Camus a commis l’irréparable en récidivant et en généralisant dans son livre La Campagne de France : journal (1994) paru – et interdit – en 2000. Il aurait dû comprendre que Laure Adler (Bretonne mariée à un Juif) était judéophile par amour et lui pardonner.

2) Loi promulguée à la suite de deux rapports, l’un de Patrick Weil, juif, l’autre de Sami Naïr, musulman. C’est comme si le code pénal était rédigé sur rapport d’un braqueur de banque. De « gaulois », point ! C’est le principe du communautarisme : la France devient une auberge espagnole où chacun fait sa tambouille.

3) Je connais personnellement des élus qui ont participé à l’époque à des réunions préparatoires à l’adoption de ces lois organisées par le lobby de l’immigration.

4) Des interrogations se font jour ici ou là. Lire.

5) C’est lui qui se présentait ainsi.

6) J’ignorais que la responsabilité collective relevait du droit !

7) Qui a refusé de recevoir la famille Hamouri.

la radio des êtres humains

 

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