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Peut-on se passer du Qatar et de l’Arabie saoudite ? Par Kader Hamiche

2 février 20150
Peut-on se passer du Qatar et de l’Arabie saoudite ? Par Kader Hamiche 5.00/5 4 votes

Publié le : 30 janvier 2015

Source : kader-hamiche.fr

 

A quoi… euh, à qui servent nos relations avec le Qatar ?

C’est très français, de commencer à s’interroger sur ses (mauvaises) fréquentations seulement une fois qu’elles ont fait de gros dégâts. Tout le monde sait depuis longtemps que le Qatar et l’Arabie saoudite financent l’islam terroriste. Eux vous diront qu’ils financent l’islam mais comme leur islam est de l’espèce la plus rétrograde et la plus propre à servir de prétexte aux tueurs en tous genres, c’est du pareil au même.

Mais, comme toujours, ceux qui se posent la question des relations diplomatiques et commerciales que la France entretient avec les deux pays pourvoyeurs de fonds du terrorisme international ne vont jamais jusqu’à dire clairement en quoi ces relations sont bonnes pour notre pays. Et pour cause : les réalités tiennent en deux données. Le commerce bilatéral entre la France et l’Arabie saoudite culminait à 9,5 mds€ en 2013 ; la France vendait pour 3,4 mds€ dont 1,9 md€ de produits Alstom (métro de Ryad et centrales thermiques). Les montants parlent d’eux-mêmes : notre commerce avec l’Arabie saoudite ne représente qu’un peu plus d’1% des échanges de la France avec l’étranger.

Pour le Qatar, le constat est plus édifiant encore. Les échanges franco-qataris se sont élevés en 2013 à 1,58 mds€, c’est-à-dire 0,17% du montant total de notre commerce international. Pour information, nos échanges avec la Belgique (11 millions d’habitants) se sont élevés à 72,6 mds€, soit plus de six fois le total cumulé de ceux avec l’Arabie saoudite et le Qatar. Vous l’avez compris, on se demande pourquoi on continue d’entretenir des relations avec deux pays qui comptent aussi peu pour notre économie alors même qu’on leur reproche non seulement leur soutien au terrorisme islamiste mais aussi leurs pratiques parfaitement inconciliables avec les droits de l’homme : en Arabie saoudite, l’application de la charia ; au Qatar, l’absence de droit du travail qui s’apparente à un régime de quasi esclavage.

Ainsi, on entend souvent s’indigner, vidéos à la clé, des mains tranchées, des femmes lapidées, des condamnés fouettés, des femmes interdites de conduite automobile. Du Qatar, on dit pis que pendre de sa pratique de la rétention illégale de ressortissants étrangers. Parmi ceux-ci, quatre Français dont deux chefs d’entreprises encore privés de visas de sortie parce qu’ils ont eu le culot de s’opposer à leur spoliation par des associés du crû. Dans les quatre cas, la diplomatie française est impuissante et on ne note aucune campagne d’opinion pour les en sortir.

Mais on parle encore plus des milliers de travailleurs morts sur les chantiers de la coupe du monde de 2022… sans jamais évoquer le nom des entreprises qui les emploient. Et pour cause, ces entreprises ou, plutôt « cette » entreprise a pour nom Bouygues. En effet, le groupe de BTP français profite dans ce pays de nombreux contrats, dont la construction du siège de Qatar Petroleum à Doha (1 md€) et la rénovation ou construction de neuf stades en vue de la Coupe du Monde de football de 2022 (2 mds€). Dès lors, on est en droit de demander aux critiques d’aller jusqu’au bout du dossier et de tout dire ou de fermer leur …clapet.

Seulement, aller jusqu’au bout signifierait dire à qui profitent les largesses du Qatar et, surtout, parce que c’est une histoire de vases communicants, quel en est le prix pour la France. Ce prix est connu : c’est le « privilège fiscal » qui permet au Qatar d’acquérir des immeubles de prestige et des participations dans notre économie en profitant d’un régime fiscal et social favorisé. On serait alors obligé de constater que les bénéficiaires sont des intérêts privés et que le payeur est le trésor public, c’est-à-dire le contribuables. Autrement dit, quand Nicolas Sarkozy a, en janvier 2008, aménagé la convention fiscale signée en 1990 avec le Qatar, il a fait payer par anticipation aux Français les cadeaux dont ce pays l’a couvert et le couvre encore ainsi que bien d’autres personnalités politiques de droite ET de gauche. En bon droit, ça s’appelle du détournement de biens publics mais, chut ! il faut, comme Marianne (lire ici), le suggérer mais pas l’écrire.

Dès lors, l’acharnement que nos politiques mettent à entretenir des relations avec ces deux pays n’en apparaît que plus scandaleux. Quelles perspectives peuvent bien nous offrir ces deux pays, en particulier le tout petit Qatar, comparées à celles de la Russie ? En effet, on entend ici et là invoquer notre approvisionnement en pétrole et gaz ; or, le Qatar n’est que notre septième fournisseur, loin derrière la Russie (3,4% contre 20%) elle-même précédée par la Norvège et les Pays-Bas. Je parle de la Russie parce son gaz est le moins cher du marché et parce que ses réserves sont immenses alors que celles de nos fournisseurs européens sont limitées. Comment comprendre ces choix absolument incohérents et contraires aux intérêts de notre pays ? Pour la Russie, on les connaît : ce sont des raisons idéologiques relatives à l’atlantisation forcée de l’UE ; pour le Qatar et l’Arabie saoudite, ce sont les intérêts privés, qui se gavent aux dépens des Français.

Kader Hamiche

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