Politique France

Allégeance annuelle de la classe politique au Diner du CRIF : un scandale français

10 février 20120
Allégeance annuelle de la classe politique au Diner du CRIF : un scandale français 4.65/5 20 votes

Une fois de plus, la quasi-totalité de la classe politique UMP et PS est donc venu faire acte d’allégeance au traditionnel dîner annuel du CRIF. En 2011 déjà, pas moins de 25 membres du gouvernement (!) avaient répondu présents à l’invitation -on devrait d’ailleurs plutôt parler de convocation- du « Conseil Représentatif des Institutions juives de France ».

Pis encore, et pour la troisième fois en cinq ans, le Président de la République Française lui-même a également« déshonoré » de sa présence cette soirée communautaire, bafouant gravement la neutralité de sa fonction et les principes laïcs de la République qu’il est pourtant censé incarner.

En fait, et tous les ans depuis au moins deux décennies, la quasi-totalité de nos représentants politiques vient s’incliner devant ce grand consistoire… A l’exception notable et volontaire cette année d’un Nicolas Dupont-Aignan ou d’un François Bayrou, celui-ci déclarant par ailleurs dans un bien soudain mais tout de même louable éclair de lucidité : « « l’assignation publique de dirigeants politiques, invités à ce type de manifestation, ne correspond pas à ma vision de la République » (1) . Il aurait d’ailleurs dû dire « ne correspond plus », le patron du Modem ayant, comme les autres, participé par le passé à cette grand messe communautaire.

Au fils des dîners, Dominique de Villepin, Jean-Louis Borloo, Rama Yade, Claude Bartolone, Manuel Valls, Jean-Marie Le Guen, François Lamy, Aurélie Filippetti, Harlem Désir, Nathalie Kosciuzko-Morizet, Rachida Dati, Claude Guéant, Christine Boutin, Jeannette Bougrab, Thierry Mariani, Roselyne Bachelot, Nadine Morano, Frédéric Mitterrand, Claude Goasguen, Christian Estrosi, François Baroin, Bernard Kouchner, Simone Veil, Alain Juppé, Laurent Fabius, Eric Raoult, Alain Juppé, Pierre Moscovici, François Fillon,  et l’on pourrait continuer cette liste encore longtemps, sont donc venus faire acte de présence, on devrait plutôt écrire acte de soumission. Oui, tous, sauf évidemment ceux qui sont interdits de séjour, comme bien-sûr Marine Le Pen ou son père avant elle, mais aussi et depuis peu les écologistes et les partis d’extrême-gauche, pour des raisons que l’on évoquera plus loin.

A chaque fois, cette soirée est  l’occasion d’entendre de la part de nos chers politiques des déclarations plus sidérantes les unes que les autres, quand on sait qu’elles sont faites par des représentants de la Nation, des serviteurs de l’Etat.

Ainsi a-t-on pu voir cette année un Jérôme Guedj, tout jeune président du conseil général de l’Essonne, s’amuser du fait qu’il était invité pour la première fois parce qu’ « Au CRIF, ils m’ont appelé en me faisant remarquer que j’étais le seul président de conseil général juif » !

On a pu entendre François Hollande et à quelques jours d’intervalle faire feu de tout bois, déclarant dans un enthousiasme totalement désintéressé, entre sa rencontre préliminaire le 25 janvier avec la direction du CRIF et ce fameux dîner  : « Je viens chaque année, il n’y a pas de raison en 2012 de modifier ce qui est pour moi un rendez-vous avec les juifs de France » et «si Israël est l’objet de tant de critiques, c’est qu’il constitue une grande démocratie » mais aussi un invraisemblable « c’est sans doute au PS que l’on trouve le plus grand nombre d’amis d’Israël et du peuple juif ».

Stéphane Le Foll, responsable de l’organisation de la campagne de François Hollande déclara pour sa part : « On n’avait pas de raison de dire non, c’est le genre de dîner où tout le monde va »…« Le CRIF, on y est allé quasiment tout le temps, c’est comme ça, il y a des choses qui s’installent ».

Imagine-t-on comme seulement possible l’existence d’un autre groupe de pression aussi ouvertement communautaire qui accueillerait un tel défilé de personnalités politiques sans déclencher immédiatement et à juste titre une levée de boucliers générale, une protestation scandalisée et unanime de la sphère médiatique ?

En se rendant comme un seul homme et le doigt sur la couture du pantalon à cette convocation du CRIF, la classe politique française, comme on l’a déjà dit pour le  Président, trahit l’idéal et les principes qu’elle est supposée défendre.

Ces principes universalistes radicalement hostiles au communautarisme que le Duc de Clermont-Tonnerre énonçait déjà en montant en 1789 à la tribune de la constituante pour y déclarer : « il faut refuser tout aux juifs comme nation dans le sens de corps constitué, et accorder tout aux juifs comme individus ».

La République Française s’est historiquement construite contre tous les groupes de pression, toutes les composantes arbitrairement différenciées du corps social. Elle se prosterne aujourd’hui de plus en plus ostensiblement devant le plus puissant des lobbys communautaires, quand bien même celui-ci ne représente qu’une infime partie de la population française.

 Car là est bien le plus scandaleux, le plus délirant dans cette affaire : selon Sergio DellaPergola de la Hebrew University of Jerusalem  il y avait en 2010 en France environ 485 000 personnes de confession juive (2). Soit un peu moins de 0,75 % de la population totale du pays. A imaginer -en étant très généreux, car cela est hautement improbable- que les deux tiers de ces français juifs se considèrent être légitimement « représentés » par le CRIF, voilà donc un organisme qui prétend  parler pour 325 000 personnes. Ce chiffre rapporté aux 65 millions de Français nous donne donc un total d’à peine 0,50 % de la population du pays ! Imagine-t-on un autre groupe social -qu’il soit religieux, philosophique ou ethnique- aussi dérisoire à l’échelle de la population globale occuper une telle place dans la vie publique française ?

La chasse au « vote  juif », à supposer qu’il existe, ce qui est d’ailleurs sans doute un pur fantasme, ne saurait donc expliquer un tel empressement de la part de nos représentants politiques : déployer avec une telle constance une servilité aussi manifeste ne saurait s’expliquer quand il s’agit de glaner hypothétiquement quelques dizaines de milliers de voix.

Comment alors justifier cette ruée annuelle, si ce n’est par la certitude qui habite  notre personnel politique que le CRIF représente non pas des électeurs, mais bien une puissance économique, médiatique et donc politique qui n’a pas son équivalent sur le territoire français ? Qu’il s’érige aujourd’hui en tribunal omnipotent qui peut faire et défaire les carrières, et auquel seuls Le Siècle et la franc-maçonnerie seraient peut-être en mesure de tenir la dragée haute en matière d’influence occulte. On notera d’ailleurs au passage que les passerelles entre ces trois « états dans l’Etat » abondent. Mais c’est -peut-être- une autre histoire…

Le Dîner du CRIF n’est donc pas comme l’a écrit Libération « un rendez-vous à forte valeur symbolique », mais bien un rendez-vous à forte valeur ajoutée (3)

 Il n’est d’ailleurs que de constater le traitement médiatique des bannis…. Marine Le Pen, Nicolas Dupont-Aignan, Eva Joly, Jean-Luc Mélenchon, les communistes… Tous sont régulièrement maltraités, moqués, méprisés, ringardisés par les médias dominants. Et il sera à cet égard sans doute très intéressant dans les prochaines semaines d’observer l’évolution du traitement médiatique réservé à un François Bayrou jusqu’alors plutôt épargné par la meute journalistique, suite à sa subite prise de distance républicaine.

 

Faux intitulé et vraies motivations

Prétendant représenter les « Juifs de France » (et non les Français de confession juive, ce simple choix sémantique faisant d’ailleurs à lui seul déjà sens), le CRIF est bien plus en réalité un groupe de pression politique qui affiche un soutien inconditionnel à l’état d’Israël. Prétendant souvent privilégier le dialogue, il n’accepte pourtant celui-ci qu’avec ceux qui partagent ou cautionnent intégralement sa grille de lecture totalement partisane des évènements qui embrasent depuis plus de cinquante ans le Proche-Orient. Un dialogue qui a donc rapidement tout du monologue…

Prétendant qu’on a « bien-sûr » le droit de critiquer la politique israélienne, le CRIF ne cesse pourtant de publier des communiqués rageurs contre tout imprudent, tout inconscient qui se risque à le faire. Il ne manque pas d’excommunier immédiatement et définitivement ceux qui se permettent d’émettre la moindre critique envers l’état hébreux, même étayée par des faits incontestables, en invoquant immédiatement le mot définitivement infâmant d’antisémitisme.

Les fatwas lancées de façon récurrente contre un Charles Enderlin -pourtant Israëlien lui !- suite à son reportage sur la mort du petit Mohammed al-Durah en 2000, en sont un exemple assez ignoble. Onze ans après les faits, une abjecte chasse au « judéo-traître » continue encore et toujours au sein de l’organisation dirigée aujourd’hui par Richard Prasquier.

Le véritable lynchage médiatique qui s’est abattu à la fin de sa vie sur un Raymond Barrre accusé de « rejoindre l’extrême-droite » parce qu’il avait osé dénoncer un « lobby juif, capable de monter des opérations indignes » en est une misérable autre preuve.

Censeur zélé, le CRIF intervient régulièrement encore et avec le soutien enthousiaste de son partenaire communautaire l’UEJF (Union des Etudiants Juifs de France) pour faire annuler telle conférence, tenter de faire supprimer telle émission de radio, dès lors qu’elles présentent le rédhibitoire défaut de ne pas aller dans le sens de sa propagande éhontée.

La majeure partie des discours prononcés lors de ces fameux dîners annuels, que ce soient ceux des invités ou ceux du président du CRIF, s’articulent dès lors logiquement, régulièrement, et même presque exclusivement autour de la politique suivie par la France vis-à-vis de l’état Hébreux.

Nicolas Sarkozy l’a cette année encore bien compris, puisqu’une nouvelle fois, et comme l’a relevé l’Express, il s’est exprimé « plus sur Israël et le conflit qui l’oppose à la Palestine, que sur les Juifs de France » (4).

C’est d’ailleurs aussi sur cette base exclusivement pro-israélienne que sont désormais privés de diner -j’allais écrire privés de dessert- les représentants de EELV, les communistes ou Jean-Luc Mélenchon, jugés beaucoup trop favorables à la cause palestinienne. Eva Joly, traitée en cette occasion comme une vulgaire Marine Le Pen, n’a donc cette année encore pas été conviée car « son parti est très engagé dans le boycott des produits israéliens ». Sic. On aimerait qu’on nous explique le rapport -apparemment évident pour le CRIF- entre la critique de la politique coloniale suivie par Israël, ou le boycott commercial d’un pays étranger et une « rencontre amicale avec la communauté juive de France » ?

L’invraisemblable mise en avant de la famille de Gilat Shalit, véritable star de la soirée de mercredi, ou la polémique déclenchée par l’absence -jugée scandaleuse par nombre de ses membres- de la famille Zeitouni (5), en disent là aussi bien plus qu’un long discours sur la véritable raison d’être et les motivations profondes du CRIF.

 

Halte au feu !

Sur internet se multiplient aujourd’hui des listes de noms recensant les très nombreuses personnalités juives des médias, de la politique ou des sphères de pouvoir français. Malgré tout ce qu’elles peuvent avoir de profondément dérangeant, ces listes n’en révèlent pas moins une certaine vérité, pour ne pas dire une vérité certaine. Et comme le disait Jean-François Kahn il y a quelques années sur un tout autre sujet, l’important  n’est pas de considérer qu’une information est choquante ou pas, mais bien savoir si elle est vraie ou fausse. Il est alors impossible de nier certaines réalités, surtout quand elles relèvent d’une telle évidence.

La surreprésentation aveuglante, défiant toutes les probabilités mathématiques, et dans presque tous les médias français -sur les ondes de certaine radio ou sur les plateaux de telle télévision d’actualités- bien que totalement occultée par les supports d’information dominants, n’en est pas moins de plus en plus mal vécue par un nombre toujours grandissant de nos concitoyens. Il suffit d’écouter un peu autour de nous pour en prendre immédiatement conscience. Considérer que cela ne mérite pas qu’on s’y arrête, faire semblant de ne rien voir pourrait bien avoir, à terme, de terribles conséquences.

Car concernant les « Juifs de France » comme aime à les qualifier le CRIF, il ne peut plus aujourd’hui s’agir d’afficher un esprit de solidarité protectrice et bien légitime envers une communauté brimée, ostracisée, ou fragilisée par un environnement hostile. En 2012, on ne peut au contraire que constater le pouvoir désormais écrasant dans la société française d’une communauté ultra-minoritaire mais ô combien privilégiée, « sûre d’elle-même et dominatrice », comme aurait pu le dire le Général De Gaulle.

Une telle surreprésentation que rien de rationnel ne saurait justifier finira fatalement par avoir des conséquences. Avoir favorisé cet abus de position dominante est bien sûr foncièrement choquant sur le pur plan de l’égalité républicaine, mais c’est aussi totalement irresponsable concernant le maintien de la cohésion nationale. Comment en effet empêcher d’autres communautés, récemment implantées sur le territoire national ou beaucoup plus anciennes, très souvent bien plus conséquentes, de constater amèrement une injustice  aussi flagrante ? Or si l’on commence par constater un fait qui scandalise, on en vient rapidement à le condamner, puis bientôt à le combattre… Et c’est alors que tout –hélas !- devient possible… La raison n’a de pire ennemi que la colère, et il sera bien temps alors de pleurer sur un antisémitisme aveugle et furieux qu’on aura en réalité tragiquement fait renaître.

Est-il possible qu’aucune voix ou presque ne se lève chez nos compatriotes français de confession juive devant de tels excès ? Un Rony Brauman (6), une Esther Benbassa (7) ou un Eric Zemmour (8) sont hélas bien seuls à essayer, parfois, de tirer la sonnette d’alarme. Souhaitons que d’autres, vite, les rejoignent !

Et il serait aujourd’hui sage, sinon urgent d’enfin relire Bernard Lazare… (9)

 

ML – La Plume à Gratter

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