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Vie et mort d’Amine Bentounsi, petit caïd et tête brûlée

28 avril 20120
Vie et mort d’Amine Bentounsi, petit caïd et tête brûlée 5.00/5 1 votes

Publié le : 28 avril 2012

Source : marianne2.fr

Qui était vraiment Amine Bentounsi, tué par un policier le 21 avril dernier ? Révélations sur le parcours judiciaire et carcéral d’un petit voyou sans envergure dont la mort a embrasé la police.

La seule ressemblance que l’on puisse trouver entre Amine Bentounsi et Jacques Mesrine, c’est qu’ils ont tous les deux été balancés. Mesrine par un voyou pas très sûr, Bentounsi par un garçon qui ne voulait pas le voir en liberté et qui a appelé les flics depuis la cabine téléphonique la plus proche. Pour le reste, tout oppose le caïd de Meaux devenu le symbole de l’insécurité entre les deux tours de l’élection présidentielle au voyou parisien. Leur vie comme leur mort : Mesrine est tombé sous les balles de l’antigang, Bentounsi sous celles d’un jeune gardien de la paix qui ne s’était presque jamais servi de son arme et qui venait de calmer une rixe à la piscine municipale du coin après un concours de waterpolo.

Amine Bentounsi est né à Meaux le 5 septembre 1982, dans une famille originaire du Maroc. Petit, nerveux, fanfaron pour deux, grand fumeur de joints, sorti trop tôt de l’école pour avoir appris à lire, il a connu très tôt le tribunal pour enfants puisqu’il comparait pour la première fois à l’âge de 15 ans. Les faits (des dégradations jugées dangereuses) se sont produits deux ans auparavant, en 1995. Il est condamné à 5 mois d’emprisonnement.
Amine Bentounsi a de nouveaux ennuis avec la police pour un « vol par effraction » et un « vol aggravé » en 1999. Il a 17 ans et se voit envoyer pour 4 mois sous les verrous. Libéré en mars 2000, il retombe pour un petit trafic de stupéfiants en janvier 2001. Déféré cette fois devant le tribunal correctionnel, il écope d’un an de prison et d’une interdiction de séjour de 3 ans. Il revient devant la même chambre correctionnelle un an plus tard, cette fois pour « violence commise en réunion suivie d’incapacité n’excédant pas 8 jours », une bagarre qui lui vaut 3 ans de prison dont 1 an et 6 mois avec sursis avec mise à l’épreuve de 2 ans. Dans la foulée, il accuse le maire de Meaux, jean-François  Copé, de l’avoir payé pour mettre le feu à des voitures, avant de se rétracter.
Le 12 octobre 2004, Bentounsi change de braquet : il comparait devant la cour d’assises de Melun. Les faits : un vol avec arme commis en octobre 2001, avec un complice qui n’a pas hésité à tirer sur la police. Il est condamné à 4 ans de prison. Libéré en conditionnelle au printemps 2005, il voit six mois plus tard son sursis révoqué par le juge d’application des peines. Motif : détention de stupéfiants. Entretemps, la police lui a imputé un autre braquage, mais la confusion des peines joue pour lui.
La dernière action connue du « caïd de Meaux » se produit le 1 er août 2005 : le braquage pour quelques sous, à main armée, d’un magasin Auchan. Incarcéré le 21 octobre 2005, il est condamné à 8 ans d’emprisonnement. Première permission 5 ans plus tard : Bentounsi se met en cavale et commence une nouvelle vie, coupé de sa famille et de ses proches.
Lorsqu’un ennemi appelle la police pour se débarrasser de lui, ce samedi 21 avril 2012 vers 20 h 15, Amine Bentousni bavarde avec deux garçons devant le Celtic, un bar de Noisy-le-Sec, en Seine-Saint-Denis. Il porte une casquette bleue, un blouson en cuir Dolce & Gabbana, des gants de cuir et un ceinturon Sitialto dont il se débarrassera au cours de sa dernière course. Il est muni de faux papiers et équipé d’un revolver Llama calibre 38 CTG.
Les quatre policiers qui viennent à sa rencontre sont tous plus jeunes que lui. Trois descendent de la voiture et s’approchent. « Amine, y a les Schmitts !  » l’avertit quelqu’un. Bentounsi décampe aussitôt. Dans sa course, il fait rouler une grenade (qui s’avèrera factice) vers les policiers pour gagner quelques mètres, mais le chauffeur a fait le tour du pâté de maison et l’attend au coin de la rue. Les modalités du face-à-face ne sont pas encore claires, les versions des quatre fonctionnaires différant légèrement. Voici celle du gardien de la paix que le juge d’instruction mettra en examen pour homicide volontaire, ce qui mettra le feu à la police :
« J’ai vu l’individu courir en venant vers moi avec le révolver à la main. Il le tenait à peu près à hauteur de sa tête, en courant. J’ai serré le frein à main pour ne pas le renverser. Il a pointé son arme en me désignant. Je suis sorti de la voiture. J’avais peur qu’il vienne vers moi. D’un seul coup, je l’ai vu devant moi, face à moi, de l’autre côté de la chaussée. J’étais dans une situation de danger. Je ne savais pas où il était. Il m’a braqué à nouveau avec son arme. Il a tendu le bras vers moi. J’ai riposté en tirant pour le neutraliser car j’ai senti que ma vie était en danger… »
Panique ? Quand ses collègues sont arrivés sur place, le policier était tétanisé, ne sachant plus combien de balles il avait tirées. Il pleuvait sur la région parisienne, le gardien de la paix allait devenir le symbole de l’échec de Nicolas Sarkozy dans les banlieues et Amine Bentounsi, « tête brûlée », « écorché vif », selon un avocat qui l’a défendu, ne remettrait plus jamais les pieds dans la cité de Meaux qui l’avait vu naitre, La pierre Collinet.
Frédéric Ploquin
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