Posté le : 09 février 2012
Source : infosyrie.fr
Les opposants et l’OSDH annoncent ce jeudi la poursuite des bombardements de l’armée syrienne sur les quartiers de Bab Amr (sud-ouest), Inchaat (ou al-Inshaat, sud-ouest, au-dessus de Bab Amr), al-Khalidiya (ou al-Khaldieh, ou al-Khaldeeye, centre-nord)), al-Bayyada (nord-est) et Jouret al-Shayyah (centre) de Homs. Bombardements qui, selon les mêmes sources, auraient fait 29 morts dans la matinée.
Homs toujours capitale de la violence, sinon de la Révolution
L’agence Sana rend compte pour la journée du mercredi 8 février d’une attaque au mortier des rebelles contre l’université d’al-Baas de Homs (faubourgs sud de la ville) et d’une autre contre la raffinerie locale. L’agence fait état aussi d’une autre attaque d’un commando armé contre l’hôpital an-Nami de Homs, qui n’a apparemment pas fait de victimes mais a vu le pillage en règle du matériel sanitaire.
Toujours à Homs, Sana signale l’explosion d’une voiture piégée dans le quartier d’al-Bayyada, et de tirs d’obus de mortiers et de roquettes RPG, ainsi que de plusieurs accrochages entre soldats et insurgés, dans d’autres quartiers de la ville. Sana accuse les groupes armés d’avoir en outre saccagé et pillé un certain nombre d’immeubles dans les quartiers de Nazihine, al-Khaldieh et al-Bayyada. Bien sûr, Sana met en avant les doléances d’habitants de ces quartiers contre le climat de terreur instauré par les groupes armés, et leurs appels à une intervention énergique de l’armée : propagande, certes, mais s’appuyant sur une réalité incontestable ; même la chaîne française – et donc hystériquement anti-Bachar – I-Télé a produit voici peu des témoignages de femmes de Homs maudissant l’ASL et appelant au secours l’armée régulière (voir notre article Réinformation (involontaire) : quand I-Télé se prend les pieds dans le tapis , mis en ligne le 6 février).
Autre « front » mentionné par Sana dans son édition du 8 février, celui de la région d’Idleb, au nord-ouest du pays, non loin de la frontière turque : un groupe armé a ouvert le feu sur le bâtiment d’un bureau de recrutement de l’armée à Ariha (15 kilomètres au sud d’Idleb) : des soldats ont été blessés, mais le groupe aurait été mis en fuite, laissant sur place plusieurs morts et blessés. Par la même occasion, Sana dément tout bombardement de l’armée sur Ariha et Maarat al-Numan (25 kilomètres au sud d’Ariha).
Troisième point chaud du moment, la ville moyenne et résidentielle de Zabadani, dans un secteur montagneux sur la frontière libanaise, à une trentaine de kilomètres au nord-ouest de Damas : infiltrée voici un mois par des groupes de l’ASL, et investie par l’armée qui soumet depuis plusieurs jours la ville à des tirs nourris d’armes lourdes. C’est du moins la version de l’OSDH et des Comités locaux de coordination qui dans leur description de la situation tendent à présenter Zabadani comme un Homs en réduction, avec le même niveau de destruction et les mêmes difficultés en eau, vivres et électricité pour la population.
L’OSDH annonce aussi une attaque de blindés contre la localité de Tsil, près de Deraa.
Le matériel dernier cri – et israélien – de l’ASL à Homs
Un « commandant » de l’ASL a tenu une conférence de presse clandestine « dans un lieu proche de Damas« , qui a été diffusée sur la toile. Le « commandant Mohammed » a réclamé du matériel militaire aux puissances occidentales, évoquant ses combattants affrontant les blindés gouvernementaux « avec des armes légères« , et il a lancé un énième appel au secours de la population de Homs, confrontée, explique-t-il sobrement, « à l’une des pires machines de mort du monde« .
Des armes, les insurgés en disposent pourtant d’un grand nombre, grâce notamment aux filières qui passent par le Liban, la Turquie ou la Jordanie. On remarque d’ailleurs, une fois de plus, que les combats ou accrochages, hormis Homs, interviennent dans des régions-frontières – avec le Liban, la Jordanie ou la Turquie. Et bien évidemment, les groupes armés qui entrent ainsi en Syrie ne sont pas composés, tant s’en faut, que de Syriens.
Et les armes non plus ne sont pas toutes syriennes : la télévision en ligne jordanienne al-Haqeeqa rend compte qu »une reconnaissance blindée limitée de l’armée, aux premières heures du lundi 5 février, à Bab Amr, a été stoppée net après qu’un de ces éléments blindés légers (type BMP ou « véhicule de l’avant blindé » selon la terminologie militaire française) a été détruit instantanément par un projectile de type nouveau, plus destructeur que la classique roquette RPG : en fait un obus au phosphore blanc. Or ce type de projectile a été développé par l’industrie militaire israélienne – à partir d’une technologie allemande.
Il a fallu l’arrivée de chars lourds T72, au blindage plus résistant à ce type d’obus, pour que la progression des troupes reprenne. Mais les soldats syriens ont, dans la nuit, été victimes de tirs extrêmement précis en dépit de l’obscurité. Il a fallu que les forces spéciales s’emparent d’une position des insurgés pour que soient identifiées les armes capables d’une telle précision : des fusils à vision thermique, qui repèrent une cible grâce à un dispositif déterminant la différence de température dégagée par la cible et son environnement. Et là, la technologie est américaine, et a été utilisée en Irak soit par les G.I’s soit par les mercenaires de la société privée Blackwater. On trouve aussi ces armes à visée thermique dans le Golfe, notamment, affirme al-Haqeeqa, dans des camps d’entraînement ASL abrités sur le territoire de l’émirat d’Abou-Dhabi et gérés par Blackwater. Ce dernier point est à confirmer, mais il est désormais avéré que les insurgés de Homs bénéficient d’armes de haute technologie. Al-Haqeeqa déclare tenir ses informations de sources militaires syriennes mais également russes.
On est, là encore, très loin des insurgés aux « mains nues » qu’évoquait voici 24 heures notre lamentable ministre des Affaires étrangères !
1 500 à 2 000 activistes dans le secteur de Homs ?
Pour autant, les forces régulières ne relâchent pas la pression depuis le début de leur offensive à Homs : la ville a été décrétée, lundi 6 février, « zone militaire » dont l’entrée et la sortie sont soumises à une autorisation préalable de la part des points militaires chargés de fermer toutes les routes et les axes donnant sur la ville. De même, d’importants effectifs ont été déployés dans les vergers, les vignobles et les zones agricoles situés autour des zones d’opérations militaires, pour empêcher les insurgés de s’échapper de la ville. Al-Haqeeqa, s’appuyant sur une source militaire syrienne, rapporte que pas moins de 100 hommes armés ont été tués, ce même lundi, et qu’un nombre égal a été arrêté. Des centaines d’insurgés ont essayé de fuir vers d’autres zones, et tout particulièrement vers le centre de la ville ancienne – quartiers d’Al Khaldya, Al Bayada, Bab Sbaa – pour s’y retrancher. Le nombre de combattants armés est estimé entre 1 500 et 2 000 rien que dans la zone de Homs ; une grande partie d’entre eux auraient combattu en Irak, auparavant, et sont entrés en Syrie, avec l’appui des militaires américains et des services de renseignement saoudiens et jordaniens.
Bref, en dépit des difficultés, les forces armées syriennes semblent ne laisser aucun répit à ces groupes, et si ceux-ci ne peuvent renouveler leurs effectifs et leurs arsenaux, arrivera forcément un point de rupture. Souhaitons que cela soit le plus tôt possible, pour le bien des Syriens, pro, anti ou attentistes.
Guy Delorme (Merci à Mohamed pour ses traductions)
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