La Plume parcourt le Net

La peste et le choléra – Par Elie collin

8 novembre 20160
La peste et le choléra – Par Elie collin 5.00/5 3 votes

Publié le : 06 novembre 2016

Source : bvoltaire.fr

Les deux favoris de « la primaire de la droite et du centre », Nicolas Sarkozy et Alain Juppé, peuvent à première vue sembler incarner deux « droites » différentes ; une opposition, d’ailleurs, qui se retrouverait au niveau des personnalités des deux candidats. Qu’en est-il ?

Sarkozy incarnerait une « droite décomplexée », la droite des Français qu’on n’entend pas, selon sa rhétorique du discours du Trocadéro en 2012. Il s’est toujours voulu le héraut de cette France des classes moyennes et populaires, dépossédée économiquement par la mondialisation et culturellement par l’immigration. Assurément, la stratégie « Buisson sans Buisson » est habile et lucide sur les préoccupations des Français.

Elle serait à coup sûr gagnante si seulement Sarkozy n’avait pas eu un quinquennat pour rassurer cet électorat populaire et conservateur. Mais comment faire confiance à l’ex-Président après un sombre quinquennat, dont son narcissisme hors du commun et sa vulgaire impétuosité sont les seuls coups d’éclat ? S’il y en avait encore besoin, le livre-témoignage de son ex-conseiller Patrick Buisson, La Cause du peuple, réduit à néant le crédit intellectuel de Nicolas Sarkozy : « Question idées, c’était un polygame, adepte du multipartenariat intellectuel, toujours en quête de nouveaux produits conceptuels plus électoralement performants que ceux auxquels il avait déjà eu recours. »

En face de ce « prototype du sujet postmoderne », « écolier agité », l’image d’un Alain Juppé serein, déterminé, « droit dans ses bottes », peut paraître séduisante, mais n’est pas moins une illusion.

Avec Juppé, les reniements ne sont pas moins nombreux qu’avec Sarkozy, ils sont simplement plus discrets. Sur l’immigration, la construction européenne, le mariage gay, l’art contemporain, le libéralisme économique, la place de l’État, le multiculturalisme, Juppé a pudiquement « changé d’avis ». Il a beau jeu de se justifier en invoquant la « réflexion », il est difficile de le croire, surtout que, comme par hasard, ses changements-d’opinion-après-réflexion épousent à merveille l’air du temps.

C’est là qu’apparaît un second problème : Juppé version 2017 n’est pas de droite. Dédaignant le conservatisme pour un progressisme assumé, tendant la main à Emmanuel Macron et aux sociaux-démocrates, Juppé version 2017 est un libéral pur jus. Il assume pleinement les deux faces du libéralisme, économique et sociétal. Ses propositions sur l’identité et la souveraineté – soit le cœur du problème politique contemporain – semblent toutes droites sorties du think tank progressiste social-démocrate Terra Nova. Sa promotion de « l’identité heureuse » – qui lui vaut les louanges de Libération – sonne étrangement anachronique, aux antipodes des besoins actuels de la France.

Avec ces deux-là, la droite court au suicide. Et la formule de Maurice Druon prend tout son sens : « En France, il existe deux partis de gauche, dont l’un, par convention, s’appelle la droite ».

Elie Collin

 

EmailPrintFriendlyBookmark/FavoritesFacebookShare

Mots clés : , , , , , ,

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *


*