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Guerre du Kosovo : les trafics d’organes organisés par l’Armée de libération (extrait du livre de Péan)

1 juin 20130
Guerre du Kosovo : les trafics d’organes organisés par l’Armée de libération (extrait du livre de Péan) 5.00/5 1 votes

Publié le : 01 juin 2013

Source : atlantico.fr

La première guerre de l’OTAN au Kosovo a été menée au nom des droits de l’homme : frapper fort pour « prévenir un génocide » et stopper les troupes serbes menaçant les populations civiles. Elle était pourtant illégale. Pierre Péan démontre la terrible duplicité de la communauté internationale, Etats-Unis en tête. Extrait de Kosovo : une guerre juste pour créer un état mafieux.

En 2003, la MINUK recueille auprès de journalistes d’investigation anglo-saxons les témoignages de plusieurs anciens combattants de l’UÇK, que rongent, semble-t-il, des souvenirs lourds à porter et qui ont souhaité soulager leur conscience. Manifestement terrifiés à l’idée qu’« on » puisse les identifier (et nous verrons qu’ils ont quelques raisons de l’être, dans une région où le taux de mortalité des témoins gênants est important), tous ont requis l’anonymat le plus absolu. Et tous font, peu ou prou, sans s’être concertés, et en s’accusant eux-mêmes(1) d’avoir pris part à des crimes odieux, le même épouvantable récit.

En 1999 et 2000, expliquent-ils, ils ont été chargés par l’UÇK d’emmener dans des camions et des camionnettes, jusqu’à des prisons clandestines situées dans le nord de l’Albanie, des centaines de personnes capturées au Kosovo. Principalement des Serbes, pris entre le mois de juin et le mois d’octobre 1999, soit après l’arrêt des bombardements de l’OTAN sur la République fédérale de Yougoslavie. À partir d’août 1999, on leur a demandé de transférer plusieurs dizaines de ces prisonniers – mais aussi des jeunes femmes, originaires pour la plupart d’Europe de l’Est, qui leur ont été présentées comme des « prostituées »– vers de nouveaux lieux de détention dans le centre de l’Albanie, près de Burrel. Enfin, ces captifs ont été emmenés jusqu’à des cliniques de fortune, notamment une maison peinte en jaune – appelée depuis le début de cette affaire la « Maison jaune » – dans le hameau de Kureshi, au sud de Burrel. Là, des chirurgiens albanais ont prélevé sur ces malheureux – qui ont bien sûr succombé à ce traitement abominable, et dont les dépouilles ont été soigneusement enfouies – des organes qui ont ensuite été transportés jusqu’à l’aéroport de Rinas, près de Tirana, pour être expédiés, par avion, vers de lointaines destinations. En sus de ces prisonniers, les corps d’un nombre indéterminé de civils serbes assassinés au Kosovo ont également été « évacués » vers l’Albanie pour y être enterrés dans des lieux reculés.

Ces repentis ont tous participé à ces sinistres « expéditions ». Ces « livraisons », comme ils les appellent, ont été faites notamment pour le compte d’un « gang » particulièrement dangereux, et bien connu, expliquent-ils, pour l’application qu’il mettait à « tuer des Serbes ». Ils disent leur étonnement lorsque les soldats de l’UÇK, qui leur remettaient leurs « cargaisons » humaines, leur ont ordonné de ne pas porter atteinte à l’intégrité physique des prisonniers : « C’était inhabituel. On ne nous avait jamais demandé ça : en temps normal, nous étions libres de battre les Serbes à volonté. De leur casser un bras, une jambe… »

Très vite, ces convoyeurs ont compris qu’ils étaient impliqués dans « quelque chose » de terrible. « Un jour, explique l’un d’eux, je suis entré dans la “maison jaune”. Il y avait une très forte odeur de médecine, douceâtre, écoeurante, comme dans un hôpital : ça m’a rendu malade. Je voulais sortir de cet endroit… C’est à peu près à ce moment-là que nous avons commencé à entendre parler de prélèvements d’organes – principalement des reins – et de leur acheminement jusqu’à l’aéroport de Rinas. »

Leurs prisonniers serbes ont vite su, eux aussi, ce qui les attendait, s’ils étaient pris, au bout de l’horrible route où les emmenaient leurs gardiens – et ils les ont dès lors suppliés « de les tuer… de ne pas les laisser se faire dépecer… ».

Les témoins dont l’ONU réunit les témoignages se montrent, sur un point, unanimes : tous soutiennent que l’horrible trafic auquel ils ont participé a été coordonné par des responsables de haut – ou de très haut – niveau de l’UÇK, mais ils se montrent réticents à les nommer. Plusieurs d’entre eux, cependant, expliquent que rien ne pouvait être fait, dans la région du Kosovo où ils opéraient, sans l’aval des clans mafieux de Pejë et Prizren.

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