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Cachez ce peuple que je ne saurais voir – Par Christian Vanneste

4 mars 20130
Cachez ce peuple que je ne saurais voir – Par Christian Vanneste 5.00/5 4 votes

Publié le : 03 mars 2013

Source : ndf.fr

Peut-être faudrait-il « dissoudre le peuple » écrivait Brecht avec un humour glacial et désabusé. C’est exactement ce que fait le gouvernement socialiste, mais, hélas, il n’est pas le seul. Il y a 9 mois, les Français ont accordé tous les pouvoirs au Parti socialiste qui règne maintenant sur une majorité de grandes villes et de départements, sur la quasi-totalité des régions, sur le Sénat, sur l’Assemblée nationale et bien sûr à l’Élysée. Il place ses pions partout, sans la moindre ouverture, contrairement à Sarkozy grâce auquel une partie des postes à la Cour des Comptes ou au Conseil Constitutionnel était déjà occupée par la gauche. Cette décision n’était pas seulement tactique, elle témoignait du vide intellectuel de l’UMP, et de son sentiment d’infériorité idéologique devant la gauche. La présence très médiatisée, dans des partis qui quémandent les voix d’électeurs de droite de NKM ou Bachelot, et de bien d’autres exprime depuis longtemps cette imposture. Mais le monde médiatico-politique vit entre soi, avec la corvée périodique des campagnes électorales pendant lesquelles tous les boniments sont permis pour enchanter l’avenir et hypnotiser les électeurs. Après, chacun regagne le palais, l’hôtel de région, ou la mairie pour continuer sa petite carrière parsemée de protections et de privilèges, à condition bien sûr d’obéir au parti et à ceux qui le dirigent ou vont le diriger grâce à eux. Quand le scrutin est proportionnel, c’est encore plus « sympa ». L’électeur et l’élu, ne se connaissent pas. Il va voter pour une étiquette et pour une liste, et il suffira de courtiser habilement celui qui fera la liste, et d’aller quelquefois s’ennuyer à Bruxelles ou Strasbourg, le portable à la main.

Il y a donc aujourd’hui une caste politique qui sans jamais avoir exercé un vrai métier, ni témoigné d’une authentique compétence, va diriger l’immense majorité des Français, qui ont un vrai métier qui les a empêchés de se lancer en politique, possèdent de réels talents qui font prospérer le pays réel et vivent au sein de familles dont le bonheur est leur préoccupation principale. Il y a l’oligarchie médiatico-politique et il y a le peuple. La première ne cesse d’évoquer la République et la démocratie. Le second souhaiterait être parfois entendu et mieux dirigé, en matière d’emploi, de sécurité ou d’immigration, par exemple : demandes extravagantes portées par un populisme méprisable, remontées nauséabondes des heures sombres de notre histoire ! Le populisme, c’est l’ennemi de la démocratie. Ce paradoxe revient donc à dire que les représentants du peuple, élus par lui, sans doute par distraction, tiennent en fait leur pouvoir d’un savoir hors de portée du commun des mortels, dont, malheureusement, le peuple, dans son ignorance ne parvient pas à percevoir les bienfaits. C’est ainsi que lorsqu’un million de personnes descendent dans la rue ou que 700 000 se donnent la peine d’écrire au Conseil économique, social et environnemental pour dire leur désaccord sur le projet absurde de marier des gens de même sexe, le pouvoir regarde ailleurs et n’entend rien. Le Marais et la faune médiatique qu’il abrite et qui peut « faire » l’opinion à coups de sondages truqués, de chiffres fallacieux et de fictions orientées compte bien davantage.

L’État libéral repose sur trois pouvoirs. En France, il n’y en a que deux, l’Exécutif et le Législatif, le second soumis au premier pour le meilleur et pour le pire. Il y a une Autorité Judiciaire. Normal, elle n’est pas élue. Mais, elle n’en réclame pas moins son indépendance ! Au nom d’un professionnalisme dont sont dépourvus les élus et de connaissances que le peuple ignore ! Il serait même urgent, pour parfaire le fonctionnement de la Justice, de diminuer son coût, d’accroître son efficacité et d’augmenter son rendement, que les jurés populaires n’encombrent plus les voies judiciaires. Sarkozy avait voulu en introduire en correctionnelle. Deux magistrats viennent dans un rapport sans le moindre parti-pris de dénoncer la nocivité de l’expérience. Mme Taubira va s’empresser de les écouter. On rend la Justice au nom du peuple français. Si, en plus, le peuple est là et qu’il s’en mêle, Outreau ne sera plus possible dans la discrétion et on ne pourra plus relâcher Fourniret sans que ça se sache !

Heureusement, il y a l’Europe, ce paradis à l’abri des peuples, cet oasis pour élu fatigué du contact rebutant avec les électeurs, cet atoll éloigné des tempêtes soulevées paradoxalement sur le continent par des fermetures d’entreprises, des paysans en colère ou des arrivées de Roms. Au moins là, que du beau monde ! Pas de lois ! Des directives pondues par des fonctionnaires de haut niveau qui encadreront la vie des Européens, tandis que leurs élus palabreront à perte de vue et voteront dans une totale irresponsabilité. Un discours moderne, généreux et surtout hyper-politiquement correct, consensuel et droit-de-l’hommiste à souhait avec lequel on ne prend aucun risque. Le bonheur avec Lisbonne, parfois l’euro, et 12% de chômeurs ! Et bizarrement, ici et là, des réactionnaires incultes semblent douter de ce chef d’œuvre. Lors de ces scrutins populistes qu’on appelle des référendums, des Français, des Néerlandais, des Irlandais osent dire non, des Espagnols protestent, indignés, des Italiens votent majoritairement contre cette admirable construction européenne, lui préférant des leaders populistes et démagogues comme Grillo ou Berlusconi. Des peuples vieillissants qui acceptaient d’oublier leurs querelles épiques parce qu’on leur avait promis la lune la voient s’éloigner tandis que montent le chômage et la précarité et que leur continent endetté compte de moins en moins dans le monde. Alors, ils ont l’audace de demander des comptes à leurs élus, de leur demander à quoi ils servent, de penser à les jeter. Quelle outrecuidance ! Il faut dissoudre les peuples qui trahissent la confiance de leurs gouvernements !

Au milieu de l’Europe, il y a la Suisse. 4e PIB/habitant au monde, avec un recul dû à son environnement européen, mais avec un excédent commercial record magré sa monnaie inaccessible, la Suisse n’appartient pas à l’Union européenne et encore moins à l’Euroland. Régulièrement, et à tous les niveaux, les citoyens helvétiques participent à des votations, à des référendums d’initiative populaire. Extraordinaire ! Dans une confédération de cantons, dans un pays composite de gens réfugiés dans leurs montagnes par amour de la liberté, dénués de nationalisme, mais légitimement fiers de leur nation, il y a un peuple qu’on écoute encore.

Christian Vanneste

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