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Islamophobie ou légitime défense ? Par Etienne Lahyre

30 janvier 20130
Islamophobie ou légitime défense ? Par Etienne Lahyre 4.60/5 5 votes

Publié le : 29 janvier 2013

Source : bvoltaire.fr

Selon une récente étude réalisée par l’institut IPSOS, 74% des Français estiment que l’islam est une religion intolérante et qu’elle n’est pas compatible avec les valeurs de la société française ; pour 80 % des Français, l’islam cherche à imposer son mode de fonctionnement aux autres.

Face à ces inquiétudes légitimes et fondées, le système met en œuvre, comme à l’accoutumée, son entreprise de disqualification intellectuelle de cette « France moisie » : peur de l’autre, repli sur soi, « beaufitude », égoïsme… Toute la phraséologie méprisante et francophobe est mobilisée pour accréditer l’idée que la méfiance du peuple français envers l’islam relève de la peur et de la méconnaissance. Nulle trace de lucidité chez nos compatriotes, donc, simplement les réflexes pavloviens que permet le cerveau reptilien du Français moyen.

C’est ainsi : aujourd’hui, l’« élite » ne trouve plus le fondement de son auto-affirmation en tant qu’aristocratie intellectuelle dans la qualité de ses analyses, mais dans le simple rejet du bon sens populaire ou de la morale bourgeoise traditionnelle. L’élite ne pense plus par elle-même, elle ne positionne désormais qu’à rebours systématique du peuple et de ses prétendus clichés.

S’agissant de la méfiance croissante envers l’Islam, deux contrevérités assénées avec force et constance tiennent lieu d’arguments aux curés xénophiles du politiquement correct :

- la France a un problème ontologique avec l’Islam, du fait de son passé colonial et notamment de la guerre d’Algérie ;
- en période de crise économique, ce sont toujours les immigrés qui servent de boucs émissaires en France (et ailleurs).

On observera que la France est présumée seule coupable : la seule évocation, par voie interrogative, d’une responsabilité, fut-elle partielle, des musulmans dans la méfiance qu’ils suscitent est exclue. La France est coupable, forcément coupable.

Ainsi notre pays paierait-il (mais jusqu’à quand ?) le prix de ses turpitudes coloniales ? Mais alors, comment expliquer que l’Italie, la Belgique, les Pays-Bas (et bien d’autres) soient confrontés aux mêmes problèmes causés par des individus issus de populations afro-musulmanes : sur-délinquance, détestation de l’autorité et des symboles de l’État ou de la collectivité, refus de s’intégrer et de partager certaines valeurs ?

Les sociétés occidentales seraient-elles dès lors, xénophobes et intolérantes, dans leur ensemble ? Mais alors, comment expliquer que les immigrés en provenance d’extrême-orient y connaissent de tels succès scolaires et économiques ? Ces populations ne s’assimilent pas systématiquement, loin s’en faut, mais elles réussissent. Que l’on nous cite un pays occidental où la majorité des afro-musulmans réussissent. Que l’on nous cite un pays marqué par des tensions religieuses et où ce n’est pas l’islam qui est à l’offensive.

Certes, mais rien de grave nous répondront les belles âmes : tout cela est dû à la crise, à la pauvreté et au chômage. Une fois les difficultés économiques passées, les tensions identitaires s’apaiseront automatiquement. L’élite commet toujours la même erreur : fonder sa vision du monde exclusivement sur une approche économique et sociale, en négligeant les facteurs idéologiques, culturels ou identitaires. C’est ainsi que beaucoup s’interrogent encore sur les raisons de la forte montée de la délinquance dans les pays occidentaux à partir du milieu des années 1960, en pleine expansion économique. Comme l’a montré Francis Fukuyama dans Le Grand Bouleversement: La nature humaine et la reconstitution de l’ordre social, les causes premières de la délinquance ne sont pas économiques mais socio-éducatives : autant de facteurs qualitatifs, difficilement mesurables, et échappant donc à la grille de lecture des technocrates saint-simoniens. Ceux-ci ne peuvent admettre que les sociétés multiculturelles sont systématiquement multiconflictuelles, indépendamment du niveau de vie général ou de l’ampleur des inégalités sociales. Ainsi que le prévoyait Raymond Aron dans L’opium des intellectuels, « les haines de race survivront aux distinctions de classe ».

Par le passé, la France n’a pas accueilli à bras ouverts Italiens, Polonais et Portugais. Mais ceux-ci, de culture chrétienne et venant en France pour y travailler, se sont assimilés. S’ils ont souvent conservé, dans la sphère privée, des pratiques culturelles et des traditions de leur pays d’origine, ils n’ont jamais exigé de traitement de faveur ou cherché à imposer ces pratiques au reste de la société. La France accueillait alors des individus, non des communautés.

Face aux revendications communautaires des musulmans, les intellectuels et la classe dirigeante ne voient de salut que dans la politique de l’autruche et des concessions de plus en plus ubuesques. Comme face aux totalitarismes des années 1930 : négation du réel, certitude que lâcheté et faiblesses combinées apaiseront l’adversaire alors qu’elles ne contribuent qu’à renforcer sa détermination.

Ceux-là même qui dispensent à longueur de journée des leçons de morale au peuple français feraient bien, quant à eux de (re)découvrir les enseignements des livres d’histoire.

Etienne Lahyre

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