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Ce que le mariage homo doit à l’Europe – Par Christophe Beaudouin

17 janvier 20130
Ce que le mariage homo doit à l’Europe – Par Christophe Beaudouin 5.00/5 1 votes

Publié le : 14 janvier 2013

Source : observatoiredeleurope.com

L’Europe ou le régime de l’illimitation. En abolissant par la loi la condition naturelle de l’altérité pour contracter mariage et fonder une famille, le projet de loi du gouvernement Hollande-Ayrault, ne fait que poursuivre l’oeuvre libérale d’un monde sans limites. Un processus enclenché culturellement en mai 1968 au nom de l’ »évolution » des moeurs et économiquement à partir des années Mitterrand (rigueur, Acte unique, Maastricht) au nom du marché européen puis mondial.

C’est l’abolition progressiste de toutes les limites, de toutes les frontières, qui nous ramène tranquillement à la guerre de tous contre tous, celle là même que l’UE, récemment titrée, à sa grande surprise, du Prix Nobel de la Paix, devait rendre impossible, du moins dans les rêves de ses lointains fondateurs. Le régime postmoderne de l’Europe intégrée est l’émanation institutionnelle du règne de l’illimitation. Il n’était donc pas étonnant que ce fût de ce côté-là, une fois de plus, que viendrait la grande rupture anthropologique du droit civil, du mariage et de la filiation.

Dernier exemple en date, anecdotique mais symbolique : le 24 mai, le Parlement européen avait adopté, comme d’habitude à une très large majorité droite-gauche, une résolution contre l’homophobie et la transphobie demandant aux États membres de garantir la protection des lesbiennes, des homosexuels et des transgenres interdisant toute forme explicite de critique de la condition homosexuelle ou transsexuelle. Certes, comment voter contre un texte expliquant qu’il est mal de rejeter l’autre au nom de sa « différence » ? Ce n’est évidemment pas la question. Une fois réalisé l’arrachement de l’individu à ses enracinements particuliers et communautaires – familiaux, moraux, nationaux, spirituels ou philosophiques -, le voici seul, narcisse angoissé, envahi par le vide, persuadé d’être émancipé, exhorté à désirer tout ce qui ce que l’ordre libéral-libertaire a mis dans ses rayons, finalement piégé entre l’enclume du marché mondialisé et le marteau des droits individuels et minoritaires. On lira en ce sens les excellentes analyses de Jean Claude Michéa et Serge Latouche, notamment.

En réalité, voilà plus de vingt ans que le Conseil de l’Europe et l’Union européenne oeuvrent patiemment, sans en avoir reçu la compétence d’ailleurs, pour faire avancer la « reconnaissance » légale de la famille homosexuelle par les Etats membres.

Depuis la fin des années 90, la Cour européenne des droits de l’homme a adopté une approche libérale  des questions liées au « statut » homosexuel, dans l’interprétation qu’elle livrait de la Convention EDH. La Cour de Strasbourg a ainsi identifié l’« orientation sexuelle » comme un motif de discrimination interdit, par application de l’article 4 de la CEDH[1].

Sans en tirer une base juridique en faveur de la reconnaissance d’un droit européen au mariage homosexuel, elle parachève touche par touche, sujet par sujet, arrêt après arrêt, une jurisprudence qui tend clairement, à une telle reconnaissance. Elle a par exemple jugé, en 2003, que le refus d’inscrire un partenaire homosexuel d’un défunt dans son ordre successoral constituait une violation conjointe des articles 8 et 14 de la CEDH[2]. Dans un arrêt « EB » de 2008, elle a condamné la France pour violation de la Convention EDH parce que ses autorités ont refusé d’octroyer à une femme l’agrément d’adoption. Le fait que cette candidate à l’adoption était lesbienne ayant certainement motivé le refus d’agrément, celui-ci constitue une violation de l’interdiction des discriminations basées sur l’orientation sexuelle (article 14) et de la vie privée et familiale de la plaignante (article 8)[3]. S’il n’y a pas ici de reconnaissance directe d’un « droit à » l’enfant et à la parentalité pour les couples de même sexe, ces condamnations successives de ce qu’elle conçoit comme des discriminations à l’encontre des homosexuels, semble y conduire progressivement.

Dans une affaire jugée en 2010, elle a franchi un nouveau pas, en estimant que si « le droit de se marier » ne peut être reconnu, en vertu de l’article 12 de la Convention aux couples homosexuels, ceux-ci devaient être respectés dans leur vie de famille par application de l’article 8 de la Convention. Considérant les progrès, selon elle, d’un consensus européen vers un statut formel du couple homosexuel[4], la Cour avertit que son absence, dans le futur, sera probablement jugée comme une violation des articles 8 et 14 de la CEDH.

Longtemps, les juges de l’Union ont œuvré dans la même direction que ceux du Conseil de l’Europe, mais avec des occasions et des instruments juridiques plus limités, en apparence, jusqu’au traité d’Amsterdam. Coté « soft law », l’Union a largement procédé en la matière par encouragements, en adoptant plusieurs résolutions qui invitent les États membres à se doter d’une législation autorisant le mariage et l’adoption homosexuels, formule juridique non contraignante. Après l’entrée en vigueur du traité d’Amsterdam, c’est à une directive-cadre de 2000 que l’on doit l’interdiction expresse, pour la première fois au niveau de l’Union, de la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle sur le lieu de travail[5].

Le législateur de l’Union ayant ainsi introduit ce concept nouveau de discrimination liée à l’«orientation sexuelle », la Cour de Luxembourg a trouvé le fondement juridique qui lui manquait. Dans son arrêt « Maruko » qui portait sur l’application de la directive-cadre, elle a jugé que les couples homosexuels reconnus par un statut légal de partenariat, quel qu’en soit le contenu, la forme ou l’appellation et à condition que le juge national considère le statut équivalent à celui du mariage, devaient dès lors être traités sur un pied d’égalité dans le cadre du travail. Il s’agissait en l’espèce du droit à la pension de réversion en faveur du partenaire survivant[6]. Elle partage ici l’avis de la Cour Européenne des Droits de l’Homme (Arrêt « Burden contre Royaume-Uni», 29 avril 2008). L’assimilation des couples homosexuels unis civilement aux personnes mariées, s’opère ainsi progressivement.

Au titre de la lutte contre les discriminations fondées sur l’orientation sexuelle, la CJUE s’est encore prononcée dans une affaire «Römer» au sujet d’une pension de retraite perçue par un partenaire enregistré qui était inférieure à celle perçue par une personne mariée[7].

Ni le législateur, ni le juge suprême de l’Union n’ont cependant jusqu’ici, dans les traités, la compétence en droit de la famille qui leur permettrait soit d’imposer purement et simplement aux États d’ouvrir l’institution du mariage et, par suite, de la parentalité à deux personnes de même sexe, soit d’inventer un statut voisin, de partenariat homosexuel homogène à l’échelle de l’Union. Elle pourrait alors lui faire produire des effets de droit équivalents à ceux du mariage.

Cette absence de compétence formelle pour créer un droit européen de la famille n’est certes pas un obstacle juridique insurmontable pour des institutions déjà fort bien dotées en compétences dans tous les domaines et instruments juridiques de toutes sortes, souvent déterminées et rarement contrariées dans leur audace.

En outre, l’idée d’un code civil européen fait depuis quelques années son chemin.[8]

En 2003, la directive sur le regroupement familial[9] et en 2004 celle sur la liberté de circulation des citoyens de l’Union[10] ont été l’occasion de favoriser l’intégration du partenaire homosexuel parmi les membres de la « famille » du citoyen européen et d’y attacher tous les droits prévus par ces textes.

Pour les ressortissants des pays tiers, le regroupement familial, quant à lui, ne vise encore que les conjoints mariés. En 2004, la directive sur la libre circulation des citoyens de l’Union traite la question sous l’angle de la reconnaissance mutuelle entre les États membres des partenariats et mariages conclus entre personnes de même sexe. Elle prescrit notamment que le partenaire enregistré d’un citoyen de l’Union exerçant sa liberté de circulation, jouit du droit de résider dans l’État d’accueil à deux conditions : si le partenariat est bien enregistré sur la base de la loi d’un État membre et si dans l’État d’accueil les effets du partenariat sont équivalents à ceux du mariage[11].

Il n’est cependant pas encore clairement affirmé que les mariages conclus entre personnes de même sexe seraient, dès lors, reconnus au sein de l’Union au titre de l’exercice des droits de libre circulation.[12] On observe qu’ici le législateur européen respecte les législations nationales des États tout en déduisant de l’existence de tels statuts dans les pays d’origine et d’accueil, des effets de droit pour le partenaire homosexuel du citoyen européen. Mais il semble disposé à s’en affranchir lorsqu’il stipule que les États doivent favoriser « l’entrée et le séjour du partenaire avec lequel le citoyen de l’Union a une relation durable, dûment attestée. »[13]

On le voit bien, le processus juridique européen en faveur de la reconnaissance du mariage homosexuel est en progression, par la pose de nombreux jalons – ou plus exactement des cliquets – législatifs et jurisprudentiels, dans le but de faire progresser le fameux « consensus européen ». Notons que les questions tant du mariage que de l’adoption par un couple composé de personnes de même sexe se posent ouvertement dans toutes les démocraties contemporaines. Elles sont traitées, là encore, moins du point de vue de tels principes moraux, religieux ou philosophiques supérieurs qui guideraient le législateur, mais du point de vue de l’individu lui-même, libre de manifester ses préférences, dont la seule limite est la liberté des autres individus.

Dans un ordre libéral (par opposition à l’ordre autoritaire) qui connaît peu le devoir et la responsabilité, essentiellement réglé par le consentement et le contrat, sans guère de considération d’ordre public, de moralité ou d’éthique collective (laquelle est confinée à la sphère privée), il n’y a plus aucun motif d’interdire l’accès au mariage ou à un statut légal non seulement de deux personnes de même sexe, mais aussi pourquoi pas d’individus parents et même de plus de deux individus[14].

Le droit de la famille étant encore formellement de la compétence nationale, le « droit de se marier et de fonder une famille », reconnu par la Charte ainsi que la liberté fondamentale de circulation au sein du marché intérieur, constitueraient des canaux privilégiés pour l’Union si elle entendait faire progresser les États vers la reconnaissance du mariage et donc de la parentalité homosexuelle.

Si certains pays (Belgique, Pays-Bas, Espagne pour les plus anciens) ont franchi le pas du mariage, beaucoup d’autres n’y sont pas encore prêts, mais ont déjà institué un statut légal pour les unions homosexuelles, avec des effets patrimoniaux plus que matrimoniaux, aux appellations et contenus variables selon les États.

L’accès de personnes de même sexe au mariage ou à tout autre statut dépassant la dimension patrimoniale induit naturellement l’accès à la parentalité

Il n’y a en effet théoriquement plus de raisons à leur interdire l’accès à l’adoption et à la procréation médicalement assistée. À la base de la revendication homoparentaliste, l’idée de reconnaître un « droit à l’enfant » pour des couples homosexuels. D’un côté, en effet, le désir – jugé légitime dès lors qu’il n’empiète sur la liberté de personne d’autre – d’un couple composé de personnes de sexe identique d’adopter et d’élever un enfant. De l’autre, la recherche d’une validation de certaines théories psychosociologiques relatives à l’équilibre de l’enfant élevé par des personnes de même sexe. C’est bien sur le terrain scientifique et par un traitement « objectif » du cas de l’enfant, que se situe la justification homoparentaliste[15].

Les textes européens sont plus clairs s’agissant des enfants « issus » d’un couple homosexuel. La directive 2003/86 relative au droit au regroupement familial et le droit de non-discrimination[16] exige que les enfants puissent jouir du droit d’entrée et de séjour indépendamment du statut juridique et de l’orientation sexuelle de leurs parents. Dans le cas des États membres dont la législation n’admet pas le mariage ou le partenariat entre personnes du même sexe, cette asymétrie juridique pourrait donc empêcher l’enfant de vivre avec ses deux « parents » homosexuels.

Ces situations pourraient être bientôt résolues soit par la Cour de justice au moyen des nouveaux instruments que lui procure la Charte des droits fondamentaux, soit par l’autre Europe des droits de l’homme, celle du Conseil de l’Europe et de la Convention EDH. Depuis l’entrée en vigueur de la Charte, les juges européens sont mieux dotés juridiquement pour faire émerger un droit européen au mariage et à la parentalité homosexuelle. Il existe une évolution notable, en effet, entre la formulation du droit au mariage par la Convention et celle de la Charte.

L’article 12 de la Convention EDH, à l’image de tous les textes internationaux, affirme qu’« à partir de l’âge nubile, l’homme et la femme ont le droit de se marier et de fonder une famille selon les lois nationales régissant l’exercice de ce droit ». Les rédacteurs de la Charte, à l’article 9, ont préféré ne pas préciser le sexe des titulaires du droit au mariage : « Le droit de se marier et le droit de fonder une famille sont garantis selon les lois nationales qui en régissent l’exercice. » Il s’agit d’une innovation considérable de la Charte par rapport à la Convention. Non seulement elle dissocie le droit de se marier de celui de fonder une famille – ce qui permet notamment de prendre en compte les familles assises sur d’autres formes d’unions que le mariage – mais elle ne précise pas le sexe des partenaires de ladite union ce qui ouvre la voie aux unions homosexuelles, notamment.

Le principe de subsidiarité fera-t-il un jour les frais de la volonté de la Cour de Luxembourg ou celle de Strasbourg, s’appuyant sur l’article 9 de la Charte, pour faire accepter le mariage homosexuel aux très nombreux États européens, notamment à l’Est, qui ne le reconnaissent pas ?  Le projet de loi français, s’il est adopté, enverra un puissant signal aux institutions de l’Union et du Conseil de l’Europe pour bousculer, dans leur culture, leurs valeurs, leurs convictions, un grand nombre de peuples européens opposés à la dénaturation du mariage et auxquels la France a pourtant souhaité unir son destin.

Christophe Beaudouin

Notes

[1] Smith et Grady c. Royaume-Uni (1999), Recueil des arrêts et décisions, 493.
[2] Karner c. Autriche, 24 juillet 2003 (2004) 38 Recueil des arrêts et décisions 24.
[3] EB c. France (2008), 47, Recueil des arrêts et décisions, 21.
[4] Environ la moitié des États membres du Conseil de l’Europe se sont dotés de dispositions législatives pour les couples homosexuels.
[5] Directive 2000/78/CE (directive-cadre) du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail [2000] JO L303/16.
[6] CJCE, 1er avril 2008, Tadao Maruko contre Versorgungsanstalt der deutschen Bühnen, C-267/06, Rec. I-01757.
[7] CJUE, 10 mai 2011, Römer c/ Freie und Hansestadt Hamburg, C-147/08, non publié au Recueil.
[8] Aucune disposition des traités n’habilite les institutions à intervenir en matière civile, sauf pour adopter des mesures de coopération judiciaire transfrontalière (article 81 § 1 TFUE : cette compétence de l’Union est limitée aux « matières civiles ayant une incidence transfrontalière ». Le principe de la reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires et extrajudiciaires en est la pierre angulaire). Cependant et malgré l’absence de base légale, le Parlement européen a souhaité, à travers différentes résolutions (du 26 mai 1989 et du 6 mai 1994), enclencher un rapprochement des secteurs du droit civil en Europe. La Commission européenne a lancé un programme (communication du 11 juillet 2001) de rapprochement du droit civil et commercial des États membres, sous l’impulsion particulière de la direction Santé et consommation (SANCO) de la Commission. La réflexion sur le rapprochement des droits contractuels recommandée par le Parlement européen est peu à peu devenue un projet de véritable codification (V. la conférence : Vers un Code civil européen. From principles to codification: Prospect for Europen private Law, donnée en anglais, dans la Grand Chambre de la Cour de Cassation, le 12 avril 2002, par le président du groupe de travail qui en a la charge, le Professeur allemand Von Bar). Ce groupe Von Bar (subventionné par des fondations privées allemandes et la Commission européenne) appréhende en effet la matière au-delà du seul droit de la consommation et de la compétence de la direction SANCO : les « torts » (responsabilité civile), la vente en général, le droit des sûretés (cautionnement, hypothèques, privilèges etc.) la construction, les assurances, les services, la propriété (droit des biens), le commerce électronique, etc… Au même moment, des travaux du même ordre sont conduits pour le rapprochement des droits de la famille, à l’université d’Utrecht. Pour l’heure, c’est le droit européen des contrats qui est le plus avancé dans cette voie. La Commission européenne a en effet publié le 1er juillet 2010 un Livre vert (10/872) présentant sept actions envisageables pour consolider le marché intérieur en accomplissant des progrès dans le domaine du droit européen des contrats et lancé une étude de faisabilité en mai 2011.
[9] Directive 2003/86 du Conseil du 22 septembre 2003 relative au droit au regroupement familial [2003] JO L 251/12.
[10] Directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, J.O.C.E. L 158, 30.4.2004, p. 77–123, article 2.2.b.
[11] Les « membres de la famille » du citoyen européen incluent donc les partenaires non mariés avec lesquels ce citoyen de l’Union a « contracté un partenariat enregistré, sur la base de la législation d’un État membre, si, conformément à la législation de l’État d’accueil, les partenariats enregistrés sont équivalent au mariage, et dans le respect des conditions prévues par la législation pertinente de l’État membre d’accueil. » (Article 2 (2) et Article 3 de la Directive 2004/38).
[12] Directive 2004/38/CE, article 2, paragraphe 2, b.
[13] Directive 2004/38/CE, article 3, paragraphe 2, b.
[14] Ces hypothèses ne sont pas imaginaires. Un parti politique néerlandais milite pour la pornographie infantile et les relations sexuelles entre adultes et enfants. Une fondation de lutte contre la pédophilie ayant intenté une action contre ce parti, le juge l’a déboutée en référé, en estimant que ce parti avait le droit d’exister comme tout parti politique et qu’il ne troublait pas l’ordre public ; en Hollande, une union civile à trois a été célébrée entre trois partenaires (un homme et deux femmes), ainsi que, tout récemment à Tupa au Brésil.

[15] V. Alain Supiot, Homo juridicus, Seuil, 2005.
[16] Directive du Conseil 2003/86/CE relative au droit au regroupement familial, 22.09.2003, JO

 

 


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