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Hollande, le fiasco total – par Philippe Tesson

29 septembre 20120
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Publié le : 24 septembre 2012

Source : lepoint.fr

Rien n’y fait. Ces dernières semaines où François Hollande a tenté de contrarier le courant d’opinion qui lui était défavorable depuis juillet n’ont servi à rien. La dernière enquête en date, celle de l’Ifop publiée dimanche par le JDD, confirme, et même amplifie une tendance négative. Le président de la République, à 43 % de satisfaits, perd 11 % d’opinions favorables. Son Premier ministre, à 51 %, en perd 7 %.

On reprochait à Hollande son immobilisme, son silence, sa transparence. Il a parlé, et on met en question ses atermoiements, ses imprécisions, sa transgression de la parole donnée. Il a pris conscience de la gravité de la crise. On ne lui en sait pas gré. Tout se retourne contre lui. Les quelques gages qu’il a récemment donnés à l’évidence et à la raison ne lui profitent pas à droite : c’est un peu tard, et cela vient après une stratégie maladroite de division et de mépris.

Quant à la gauche qu’il a portée au pouvoir au vu de sa promesse de « ré-enchanter le rêve », comment s’accommoderait-elle du prix dont elle va payer ce retour à la réalité ? Elle se sent dupée. Était-il dupe lui-même, ou feignait-il ? Dans la première hypothèse il serait nul, dans la seconde il aurait trompé son monde. Dans les deux cas, le voici piégé. De tous côtés, le voici assailli.

Car les difficultés qu’il a à vaincre aujourd’hui se sont accumulées. Sur tous les dossiers, il a perdu la main, sur tous les terrains, il est condamné à jouer la défensive. Le pire est sans doute dans le désordre qui règne au sein de sa majorité parlementaire, et qui va le forcer à une navigation hasardeuse, alors que, arithmétiquement, il est souverain. On le prévoyait : rarement dans le passé, les IVe et Ve Républiques nous en offrent le témoignage, une majorité de gauche resta longtemps unie. Il n’a fallu que deux mois pour que la culture des courants propre au PS et celle des alliances propre à la gauche prennent le dessus sur la sagesse.

Division

Un dossier sensible nous en fournit un exemple éloquent : le vote des étrangers. Sur ce sujet, François Hollande s’était avancé imprudemment. Il était pourtant instruit par le passé : il y a trente ans que les socialistes annoncent cette réforme, trente ans qu’ils y renoncent lorsqu’ils sont au pouvoir. Qu’importe, il faut prendre les voix là où elles sont, au risque de se trahir. C’est ce qui arrive aujourd’hui. Ce qui est nouveau, c’est que la pression en faveur de la réforme vient du propre camp du président, deux mois seulement après l’installation de la majorité parlementaire, alors que nul n’ignore que l’adoption du projet serait pour le moins aléatoire, aussi bien par voie parlementaire que par voie référendaire. Le fiasco est total.

Autre exemple : le mariage homosexuel. La promesse était formelle. Elle était étourdie. Les socialistes semblent avoir totalement minimisé la portée de cette réforme, dont les effets vont largement au-delà d’un simple contrat passé devant le maire. Certains d’entre eux s’en inquiètent aujourd’hui. Les Verts, à l’inverse, en demandent davantage. Était-ce si urgent ? Était-il opportun d’approfondir la division que provoque la question dans l’opinion et qui gagne même la majorité de gauche ? Était-il politiquement habile de donner, sur les deux sujets dont nous parlons, du grain à moudre au Front national ?

Reculades

En matière de confusion et de maladresse, il y a mieux encore. Pour obtenir l’adhésion des Verts dans le vote prochain concernant le traité européen, François Hollande vient d’offrir à ceux-ci des gages importants à propos de la politique énergétique : fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim, fermeture du dossier du gaz de schiste. La ministre Cécile Duflot trouve le geste très « émouvant ». C’est se foutre du monde. Quelques jours après, les Verts annoncent qu’ils ne voteront pas en faveur du traité. Ainsi Hollande est-il cocu sur les deux fronts. Il est vrai qu’il l’était déjà du fait d’Angela Merkel, à la volonté de laquelle il se soumet, en dépit de ses rodomontades passées, en signant un texte dont il dénonçait et l’esprit et la lettre. Il recule sur tous les plans : d’une part les intérêts stratégiques et industriels de la France et d’autre part l’ambition de corriger le traité… que de surcroît une partie de sa majorité ne votera pas ! Le fiasco là encore est total.

Bien d’autres sujets sont là qui dénoncent la pusillanimité, les contradictions, les maladresses, les reculades, les reniements même du nouveau président. Si la prétention, la morgue affichées pendant la campagne n’avaient été, on serait peut-être plus indulgent. Mais quoi ! On met des mois à aller à l’essentiel. On ajourne. On revient sur ses promesses. On ne relève pas les défis de sa majorité. On se plie à ses caprices. On s’occupe de tout, après avoir annoncé qu’on ne ferait pas comme l’autre. On valide la fermeture d’Aulnay, après avoir joué les fier-à-bras. On fait risette au patronat, après l’avoir traîné dans la boue. On évacue les Roms comme naguère, mais, suprême hypocrisie, on le fait « avec dignité ». On remet en selle le FN. On prend l’avion, quand on a promis qu’on ne prendrait que le train. Etc., etc. Bref, qui parle d’indulgence ?

Philippe Tesson

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