La Plume parcourt le Net

Après le voile et la kippa, Marine Le Pen enlève le bas ? Par Coralie Delaume

26 septembre 20120
Après le voile et la kippa, Marine Le Pen enlève le bas ? Par Coralie Delaume 2.00/5 1 votes

Publié le : 25 septembre 2012

Source : l-arene-nue.blogspot.fr

Marine Le Pen est une fille. Est-ce pour cela qu’elle a décidé de mettre sa rentrée 2012 sous le signe du « parler chiffons » ? On pourrait le croire à la lecture de l’entretien qu’elle a accordé au Monde du samedi 22 septembre, en prime time de son université d’été de ce week-end à La Baule. En tout cas, une chose est sûre : la patronne du Front national a une conception toute vestimentaire de la laïcité.
« MLP » souhaite en effet tout interdire et partout. Dans la rue, dans les boutiques, dans les transports, le voile islamique serait aussitôt proscrit si elle accédait au pouvoir. Quant aux autres bouts d’étoffe, on leur réserverait le même sort, histoire d’avoir l’air équitable : « il est évident que si l’on supprime le voile, on supprime la kippa dans l’espace public ». Voilà qui a le mérite de sonner égalitaire au moins autant que ça sonne creux : croyantes et croyants de toutes obédiences, dessapez-vous ! Heureusement qu’elle a précisé sur son compte Twitter ne viser en aucune façon « le personnel religieux ». Car on voyait déjà Marine Le Pen faisant mettre les nonnes nues.
Si l’on en croit sa chef, le « nouveau Front national », ainsi nommé par le sociologue Sylvain Crépon, devrait donc troquer très prochainement ses porte-flingues contre une poignée de porte-fringues prêts à se livrer sur commande à quelques séances d’épuration vestimentaire. On pourchassera toute trace de foi comme durant les grandes heures de feue l’Union soviétique, et seul l’uniforme de la mécréance sera autorisé : le Diable s’habille en Pravda.
Le truc ne manque pas de sel dans la bouche de l’héritière du parti qui fut, à l’époque de papa Jean-Marie, le plus anticommuniste du pays ; et qui servit de refuge à tous les cul-bénis ayant pour habitude de s’user les rotules sur le sol de Saint-Nicolas-du-Chardonnet, histoire de s’assurer très en amont une place de choix au Paradis.
Las, ce que nous propose aujourd’hui Marine Le Pen n’a guère à voir avec la séparation des Églises et de l’État. Ce qu’elle tente de présenter comme une panacée laïque a davantage des airs de despotisme athée. Elle s’en cache à peine, d’ailleurs, affirmant au détour de l’entretien au sujet des « printemps arabes » : « je remarque que dans les pays où il y a eu des dictatures laïques, les populations vivaient incontestablement mieux, avaient plus de libertés individuelles ». Une bonne vieille dictature anticléricale, est-ce cela qu’elle appelle de ses vœux ?

En tout cas, il y a un contresens à définir la laïcité comme le fait de régenter l’intégralité de « l’espace public ». Ça, c’est être laïcard. Au demeurant, l’expression d’« espace public » est un terme bien flou, tant il vrai que tout est plus ou moins « public », hormis votre domicile et le mien. C’est pourquoi Catherine Kintzler préfère distinguer trois types de lieux. Premièrement, « l’espace de l’autorité publique » (autrement dit les administrations d’État, les collectivités locales et l’école). Ensuite, « l’espace civil ouvert au public » (la rue, les commerces…). Enfin, « l’espace privé » (le home sweet home, les pénates, la tanière).

 Pour la philosophe en effet, le premier de ces trois espaces – celui de l’autorité publique – est également celui de « la constitution du droit et des libertés ». C’est lui qui est strictement neutre. Et cette neutralité est la garantie même de la plus scrupuleuse des tolérances ailleurs. Ainsi, dans « l’espace civil ouvert au public » comme dans l’intimité du lieu privé, on porte à peu près les habits que l’on veut. Là, « les libertés d’expression, d’opinion, etc. peuvent, dans le respect du droit commun, se déployer dans la société civile sous le regard d’autrui ».
Pas question, donc, de se laisser imposer une fausse laïcité, autoritaire et psychorigide, qui consisterait à régenter l’accoutrement des braves gens jusque dans la rue, dans les jardins publics et sous les abribus. Cette passion pour l’uniformité, c’était bon pour la Russie de Joseph Staline. Mais le Petit père des peuples est mort depuis longtemps, et ici, c’est la France. Or la France, comme disait l’autre (qui déjà ?) : « tu l’aimes, ou tu la quittes ».
Coralie Delaume
EmailPrintFriendlyBookmark/FavoritesFacebookShare

Mots clés : , , ,

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *


*