Politique France

Le « bon choix » UMP pour 2017 : le repris de justice, ou le repris de justesse ?

30 novembre 20141
Le « bon choix » UMP pour 2017 : le repris de justice, ou le repris de justesse ? 4.97/5 62 votes

« J’espère que ce sera un bon choix madame, bon choix mademoiselle, bon choix monsieur ! »… « plop ! » Thierry Le Luron & Pierre Desproges (1)

Ca y est, Sarkozy l’a finalement eue, sa nouvelle présidence… du pauvre, celle de l’UMP ! Et à l’issue d’un suspens à couper au couteau canif, dont la seule réelle incertitude résidait dans le pourcentage qui le porterait à la tête de ce Titanic politique qu’est désormais l’ex-parti chiraquien. Un feuilleton médiatico-politique totalement bidon, dont tout le monde connaissait en vérité l’issue dès lors que le petit énervé sur le retour avait décidé d’affronter les « redoutables » adversaires qu’étaient pour lui Bruno Lemaire et Hervé Mariton (défense de rire !), mais qui a tout de même passionné au-delà de tout ce que l’on pouvait imaginer notre caste journalistique, pendant des semaines et des semaines (tandis que le français moyen s’en fichait lui comme de sa première chemise)… jusqu’aux résultats d’hier soir.

 

 

Du triomphe sarkozien annoncé à la victoire à la Pyrrhus…

Dans cette élection, le vainqueur était bien évidemment connu d’avance, on l’a déjà dit : nous annoncer un « affrontement », supposer une incertitude de résultat entre un Sarkozy (même de fort petite taille) déjà par le passé président de l’UMP et ancien Président de la République, et deux nains de jardin politique (Lemaire et Mariton) dont les fan-clubs réunis tiendraient aisément dans une seule et même cabine téléphonique, c’était un peu comme chercher à nous vendre en guise de combat du siècle un match de boxe à trois entre Myke Tyson, Elie Semoun et Sim. On attendait donc fort logiquement le carnage, avec un score « soviétique », dans un affrontement qui était bien plus du registre de la pantalonnade que de celui du noble art, fût-il politique.

Pourtant, à l’arrivée, si le vainqueur est bien celui qui était dès le départ prévu, le pourcentage obtenu par l’ex-locataire de l’Elysée (et qui ne pense qu’à y retourner) a en réalité tout du camouflet, pour ne pas dire de la gifle militante. Un petit rappel : en 2004, et alors qu’il n’avait jamais été jusque là qu’un ministre parmi d’autres, qu’il se présentait contre des candidats présidents de partis qui proposaient un vrai choix politique (Nicolas Dupont-Aignan et Christine Boutin), et qu’il traînait encore comme une croix pour toute une partie de la droite et des militants sa trahison « balladurienne » de Jacques Chirac lors de l’élection présidentielle de 2002, Nicolas Sarkozy l’avait emporté avec un score écrasant : 85,09 % des voix.

En 2014, opposé on l’a dit à deux ectoplasmes, déjà une fois président de l’UMP, auréolé du prestige ultime de la fonction présidentielle qu’il avait occupée pendant cinq ans, et à la mi-quinquennat d’un successeur élyséen dont la nullité abyssale parviendrait presque à faire passer sa vessie présidentielle pour une lanterne magique, le même Sarkozy, qui était sûr de son triomphe, récolte à peine 64,5 % des suffrages exprimés, soit vingt points de moins que lors de sa précédente candidature. On a connu des triomphes plus évidents ! Et l’on ne peut en toute impartialité que constater que moins de cent jours après, le retour de l’Ile d’Elbe électorale du petit Nicolas est en grande partie raté, qu’il est même carrément un non-évènement pour une très large majorité des Français. On peut donc d’ores et déjà sérieusement se poser des questions sur ses chances réelles de succès final en 2017. D’autant plus qu’un rival il y a un an encore totalement improbable, pour ne pas dire plus, semble décidé à se dresser devant lui…

Le condamné ou le condamnable : le choix royal de l’UMP pour 2017

Car le décor « UMPesque » pour les années qui viennent et jusqu’à 2017 semble donc aujourd’hui  dressé : nous allons avoir, pendant près de trois ans,  un combat des chefs presque quotidien entre les deux – seuls – survivants du radeau de la Méduse laissé dans le marigot politique par la désastreuse présidence de Jean-François Copé : Nicolas Sarkozy donc, le battant battu de 2012 se débattant dans les « affaires », et Alain Juppé, l’ex « meilleur d’entre nous » de tonton Jacques, le nouveau champion de droite des journalistes de gauche (je sais, on est dans le pléonasme). Le troisième des mousquetaires, le malheureux François Fillon, étant semble-t-il définitivement grillé par l’affaire, on a presque envie d’écrire la magouille Jouyet. Quoique… en politique française, il ne faut jamais enterrer complètement les cadavres : les deux « vainqueurs » du jour, Sarkozy et Juppé, peuvent ô combien en témoigner !

Deux rejetés, deux rebuts politiques oubliés ou chassés sans ménagement par les électeurs, pour incarner le « renouveau de l’UMP » : avouez qu’il serait bien difficile d’illustrer avec plus d’éclat (si j’ose dire) les misères et la médiocrité de la vie politique française.

Après la balladurophilie, la Royalité, la DSKlâtrie… voici venu le temps médiatique de la Juppé-mania !

Car on a vraiment les héros que l’on mérite, et nos journaleux sont vraiment, définitivement indécrottables ! L’histoire ne leur apprend rien, et sans cesse, sur leur métier, qui n’est plus très loin en matière de vertu de celui que l’on qualifie généralement de « plus vieux du monde », ils remettent leur misérable ouvrage.

Après le triple menton balladurien aux allures d’eunuque oriental (2002), après la bécasse de la « bravitude » et du chabichou au sourire de décapsuleur (2007), après le Sardanapale des palaces de luxe « Yes we Kahn » dont les bourses baladeuses étaient si ardemment soutenues par celle de sa richissime femme Anne Sinclair (2012), tous au final ratiboisés en rase campagne électorale par un suffrage universel récalcitrant (à quoi ça sert que la presse se décarcasse ?), voici donc aujourd’hui venu le temps médiatique d’un nouveau nanar bien représentatif du niveau où croupit notre cinéma politique hexagonal : « Le Retour de la momie »… chiraquienne ! J’ai nommé Alain Juppé, le nouveau champion politique de « droite », de « gauche », du « centre » et du « tout sauf MLP » (2) de la presse française ! Alain Juppé… non, inutile de vous pincer, vous ne rêvez pas…

Certes, on l’avait bien remarqué : année après année, échéance après échéance, l’ « homme providentiel » des médias, le « bon choix pour la France » devenait de plus en plus improbable, de plus en plus sidérant. Mais avouez que faire d’Alain Juppé, l’ex porte-flingue de « facho-Chirac », désormais donc ouvertement adoubé « meilleur candidat de gauche » par les Inrocks, le recours ultime et providentiel face à la plus que probable présence au second tour de la présidentielle de 2017 de la « bête immonde », de la « peste blonde » Marine Le Pen… il fallait oser ! Et bien comme l’avait si justement relevé le regretté Michel Audiard dans Les Tonton Flingueurs, ces gens-là osent tout, il faut bien le reconnaître (3). Alain Juppé sera donc peut-être en 2017 (la presse le souhaite en ce moment plus que tout) le premier candidat à la présidence de la République… déjà mis en examen pour « abus de confiance, recel d’abus de biens sociaux, et prise illégale d’intérêt » (1999), puis déjà condamné pour « prise illégale d’intérêt » à… 18 mois de prison avec sursis et 10 ans d’inéligibilité (2003), une peine fort heureusement pour lui (et pour la France, si on en croit les médias énamourés) ramenée en appel à 14 mois de prison avec sursis et seulement un an d’inéligibilité (2004). Quel citoyen, quel électeur ne vibrerait d’aise, d’espérance et d’impatience à la présentation d’un tel champion ?

C’est parti pour la très longue nuit des tout petits couteaux

Un Sarkozy revanchard et – mal – élu à l’UMP avec le couteau entre les dents, la motte de beurre rance Juppé en coqueluche et candidat providentiel des médias… le résultat devrait paraître écrit d’avance : entre un animal politique au cynisme himalayen, même plombé par un bilan catastrophique et trimballant une véritable batterie de cuisine à la semelle de ses souliers, et un mort-vivant en préretraite bordelaise remis en scène par la seule volonté de la presse, a priori, il n’y a pas match. Et pourtant… vu comment les choses ont déjà commencé on peut, on doit s’attendre au pire d’ici 2017.

Pendant près de trois ans, nous allons assister à un festival de coups de Jarnac, de vacheries, de crocs en jambes, de bassesses, de peaux de bananes, de cadavres ou de casseroles sortis des placards, entre les deux « champions » faisandés de la « nouvelle UMP ». Cette très mauvaise pièce de boulevard va occuper, squatter les ondes radios, les plateaux de télévision et les colonnes de journaux, et ravir jusqu’à l’extase notre classe médiatique qui, si elle semble avoir d’ores et déjà choisi l’ex « meilleur d’entre nous », sera tout de même capable à l’arrivée de changer – une fois de plus – son fusil d’épaule : si le Pinocchio sarkozien parvient comme c’est tout à fait possible, voire probable (dans le genre tueur sans scrupules, il est bien plus convainquant que le grand méchant mou des Inrocks) à dissoudre, atomiser le nouveau chouchou des médias, gageons que le sosie de Louis de Funès (en beaucoup moins drôle hélas) saura retrouver in extremis la faveur de nos journaleux. Car pour vaincre une Marine Le Pen qui a tout pour eux de l’épouvantail, ils seraient même capables d’aller exhumer le cadavre – pour eux et malgré tout encore exquis – de Dominique Strauss-Kahn. Voire même – qui sait ? – dans la catégorie « vieux cochon cacochyme », de Valéry Giscard d’Estaing. C’est dire jusqu’où ils sont prêts à descendre !

Ah oui, tiens : on n’a pas fini de rigoler (jaune) !

Marc LEROY – La Plume à Gratter

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1) L’entretien au coin du feu, un sketch de T. Le Luron et P. Desproges, à voir ici.

2) Tout sauf Marine Le Pen !

3) « Les cons, ça ose tout, c’est même à ça qu’on les reconnait ! » Michel Audiard, dans Les Tontons Flingueurs.

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Une réponse pour Le « bon choix » UMP pour 2017 : le repris de justice, ou le repris de justesse ?

  1. NOURATIN le 1 décembre 2014 à 15 h 47 min

    Rien à ajouter, c’est exactement ça! On se demande comment ces horreurs là vont finir, comment
    arrêter ce cercle vicieux infernal qui nous entraîne sans arrêt de charybde en scylla, de Sarko
    en Holllande, de Hollande en Juppé, peut être…non, rien à faire, vous savez : on est foutu!
    Amitiés.

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